Vecteurs de guerre ou acteurs de paix ?
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septembre 11, 2017A Beni, les opérateurs économiques réclament la paix pour créer des emplois
A Beni, ville du Nord-Kivu, les hôtels poussent comme des champignons pour loger les nombreux humanitaires qui s’y installent et attirer les touristes.
Ville d’environ 500.000 âmes, Beni semble respirer le calme. Pour les organisations humanitaires, nombreuses à affluer ces dix dernières années à l’Est de la RDC, du fait de la persistance des conflits armés, cette ville est une ″oasis de paix″ et une base arrière à la fois sûre et sécurisante. Plus d’une dizaine d’entre elles s’y sont installées pour bien coordonner leurs opérations sur le terrain : Haut commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (HCR), Programme Alimentaire Mondiale (PAM), Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD)…
Investir dans le durable
Leur arrivée a entraîné un boom dans le secteur immobilier à Beni. ″Ils sont de bons locataires, ce qui explique l’obligation que se font les opérateurs économiques locaux à mettre à leur disposition des bâtiments confortables et spacieux″, raconte Philippe Mutshukunde, président des hôteliers de la ville. Selon lui, la ville compte à ce jour 25 hôtels, dont 17 ont été construits ces deux dernières années. ″Une dizaine répondent aux normes, c’est-à-dire qu’ils ont une cuisine adaptée à l’africaine ou à l’européenne, disposent d’un snack-bar, d’une cafétéria et ont une capacité de plus de 15 chambres avec télévision″, assure-t-il. « Pyramide Grands Lacs », « Beni New Look 2 », « Pic Marguerite », « Hôtel Irungi »…
Ces hôtels, aux noms souvent évocateurs des réalités géographiques locales, ont transformé l’image de Beni. La ville est, par ailleurs, en train de se doter d’un aéroport international, déjà en partie utilisé par les avions de la Mission des Nations unies au Congo (Monuc). Dans cette région qui attirait jadis de nombreux touristes, ces nouvelles infrastructures annoncent la reprise, aujourd’hui encore très timide, du secteur. ″Au moins deux à cinq touristes sont enregistrés chaque semaine pour visiter le Pic Margueritte au Mont Ruwenzori, ou le Mont Hoyo dans la Province Orientale″, témoigne Jean-Bosco Makasi, le chef de service urbain du tourisme à Beni.
Pour les investisseurs, essentiellement des hommes d’affaires locaux opérant dans le commerce transfrontalier avec l’Ouganda, le Kenya ou la Tanzanie, l’hôtellerie s’avère dès lors très bénéfique. L’un d’eux se dit aujourd’hui ″fier d’avoir construit un hôtel d’une cinquantaine de chambres en moins de deux ans″ à Matonge, un quartier populaire de Beni. Là, une chambre coûte 20 à 50 $ la nuitée.
Pour les commerçants, régulièrement attaqués par des bandits armés ou par des militaires en embuscade sur les routes, courant le risque d’accidents d’avion très nombreux ces dernières années, l’hôtellerie s’avère un investissement ″durable qui comporte moins de risques″, à leurs yeux. D’autres rachètent systématiquement des parcelles qui donnent sur les grandes avenues pour y construire des boutiques…
Faire régner la paix
Ces nouvelles constructions créent de l’emploi dans la ville. Maçons, menuisiers, charpentiers…, tous les corps du métier du bâtiment ne se tournent désormais plus les pouces. Ils sautent d’un chantier à l’autre. Eugène Machozi, un maître maçon, en est tout ravi. Depuis 2005 que s’observe ce boom, ″la vie est belle à Beni. Le métier de constructeur est devenu noble″, avoue-t-il.
Très satisfait de ce développement rapide de sa ville, le maire de Beni, Jules Kasereka Mungwana, encourage d’autres hommes d’affaires de sa contrée à y contribuer davantage. ″Avec tous mes services spécialisés, promet-il, je ferai tout pour que la paix règne à Beni″.